Doksy , une étoile montante du Hip Hop

Rares sont les femmes qui osent en Afrique se lancer dans le rap. Mais la rappeuse ivoirienne Doksy, de son vrai nom Dieynaba Diomande, 31 ans, l’a fait. Celle qui n’est plus à présenter en Côte d’Ivoire, déjà auteure de deux albums, n’a jamais peur de tremper sa plume dans la plaie, dénonçant les maux de la société ivoirienne, ou encore les dérives sur les réseaux sociaux. De passage à Paris pour présenter son deuxième opus, « Ivoire rap Queen », elle revient sur son parcours. Rencontre réalisée avec Afrik.com

Elle est loin de tous les clichés que l’on se fait des rappeuses, qui sont dans l’opinion publique censées être des garçons manqués à la voix grave, dissimulant leur féminité dans des vêtements amples. Doksy n’est rien de tout cela. On le comprend vite dès qu’on la rencontre. Coquette jusqu’au bout des ongles, portant des chaussures tendances à talons, assorties d’une mini jupe en tissu wax, de couleur orange, marié à une veste en cuir, celle qui arbore fièrement ses longues mèches, assume au contraire toute sa sensualité. « Les gens me demandent souvent pourquoi je ne suis pas habillée comme les autres rappeuses, qui portent une casquette, des pantalons amples. Mais ce n’est pas parce qu’on fait du rap qu’on doit ne plus être féminine ! » Et toc ! Le ton est donné dès le début, révélant son caractère bien trempé.
La rappeuse ivoirienne de 31 ans, au regard doux mais à la fois déterminé, qui fait dix ans de moins que son âge, sait s’imposer. Celle qui n’hésite pas à élever la voix lorsqu’elle s’exprime, regardant toujours ses interlocuteurs droit dans les yeux, sait pertinemment qu’elle évolue dans un univers musical très fermé aux femmes. Mais peu importe, elle s’est battue et a travaillé dur pour se réaliser. « Souvent ceux qui sont déjà dans le milieu découragent les femmes mais il faut se battre et ne pas se laisser abattre à la première difficulté car il y en aura toujours », dit-elle le ton ferme.
Du ghetto à la musique
Elle est en effet particulièrement bien placée pour savoir ce que signifie tous les synonymes du mot « lutter ». Originaire du nord de la Côte d’Ivoire, où elle est née, elle a grandi dans le ghetto, à Abidjan, dans le quartier de Abobo, où la réalité était très difficile. « Mes parents se sont installés à Abobo lorsque j’étais en CM2, encore à l’école primaire. La vie là-bas n’était pas facile, il y avait beaucoup de pauvreté. J’ai vu et vécu toutes sortes de choses », raconte-elle. « Je ne suis pas ce genre d’artistes nés avec une cuillère en argent dans la bouche qui parlent dans leurs chansons de choses qu’ils n’ont jamais vécues ou jamais connues. Mois j’ai vécu dans le ghetto, et dans mes chansons je décrie cette réalité », tient-elle à mettre au claire.
« Ma référence, une grande reine baoulé qui a sacrifié son seul fils pour sauver son peuple »
Toujours sur un ton très décalé, avec son flow fluide, sur fond de musique rythmé et de coupé-décalé, nous contraignant à esquisser quelques pas de danses, elle parle de sujets sérieux. Doksy ne craint pas d’appuyer là ou ça fait mal, dénonçant les maux de la société ivoirienne, mais aussi les dérives qu’engendrent les réseaux sociaux. C’est exactement ce qu’elle fait dans le titre Génération Facebook issu de son premier album Agalawal, ou encore dans une autre chanson, Garçon ki é koi, dans son deuxième album Ivoire rap Queen, qui évoque les relations amoureuses minées par les infidélités. Elle dénonce aussi le travail des enfants dans son titre Rêve d’enfant. « Je dénonce ce que j’ai vécu où je vois au quotidien », réitère l’artiste ivoirienne inspirée par des rappeurs comme Kerry James en France ou encore Nas aux Etats-Unis.
La jeune femme n’a jamais cédé à la facilité malgré les difficultés, affirmant fièrement avoir obtenu son bacalauréat et son diplôme à l’université en sciences économiques et sociales. « J’ai connu des filles qui se prostituaient mais moi je ne suis jamais tombée dans ça. Et c’est la preuve que quand on veut on peut. Quelque que soit la difficulté, il faut travailler dur pour réaliser ses ambitions », conseille Doksy. La rappeuse qui a déjà effectué de nombreux concerts en Côte d’Ivoire, et été invitée à de prestigieuses émissions de télévision, ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Elle ambitionne d’exporter son talent à l’international. « Je veux aussi toucher d’autres pays que le mien, notamment les pays africains, ou l’Europe. Je veux faire connaître ma musique ailleurs qu’en Côte d’Ivoire, explique-t-elle. Mais je sais que ça va aller, je suis entourée par des personnes formidables comme le producteur de musique Daniel Rosso. »
Dans un grand éclat de rire, elle lance avant de quitter la rédaction : « Vous savez, je me refère toujours à cette grande reine Baoulé qui a sacrifié son unique fils pour sauver son peuple ». On comprend mieux après ses propos d’où elle puise sa confiance en elle, qui constitue sans doute l’une de ses plus grandes forces. ( Ref : Afrik.com )

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